Izieu - Têtes d'enfants (2009)


... Pour comprendre, ce qu'il faisait là étendu sur ma route, il me fallait le quitter un temps le jeune soldat mort...
A ce point de mon périple, la peinture elle-même se refusait à m'indiquer le chemin. Elle m'avait tout dit. Et la lumière blafarde, diffuse et permanente, comme de néons, dans laquelle j'étais perdu, non plus ne pouvait m'aider. Sans levant pas de midi de couchant ni même de nuit alors plus de sud de nord d'est d'ouest, plus d'histoire.
A ce point de mon périple restait la rivière, l'emprunter, se laisser porter par les flots, seule son encre passionnée et furieuse conduisait encore quelque part... j'arrivais à Izieu.


La Beauté est l'essence qui anéantit le Mal, en neutralise les effets. Pour s'incarner et apparaître, la Beauté ne doit pas nier le Mal, mais le prendre en charge et le transfigurer concrètement par l'art, cela suppose l'Amour, c'est-à-dire une confiance foncière et inébranlable en l'existence...
Après les déicides révolutionnaires censés le libérer, l'homme devint meurtrier de lui-même. Avec la Première guerre mondiale puis la Seconde, Hiroshima et surtout la Shoah, ce "coup de grâce" à toute espérance, l'homme vit surgir de lui une figure que ni Rembrandt, ni Velasquez, Greco ou Michel-Ange... ne connaissaient : celle du Mal absolu.
Ces grands artistes oeuvraient dans l'ère du Salut que nul événement pourtant terrible n'avait été de taille à mettre en péril, aussi étaient-ils capables de cette Beauté que seul autorise le péché innocenté.

Oui, avec la Shoah s'ouvre une ère nouvelle où les peintres, sans recours et sans protection, connaissent désormais la figure essentielle du Néant que la foi en leur art doit affronter, aussi doivent-ils en appeler au sens primordial de leur geste car la Beauté reste nécessaire, vitale.

Pour retrouver l'art, répondre à sa nécessité qui demeure au fond de chacun, pour dire sa pertinence, pour retrouver l'homme malgré son crime : la Shoah, son sceau inscrit à jamais dans nos mémoires, je propose ici une série de toiles qui disent les luttes et la passion de la peinture contre ces négations historiques. (Franck Longelin)


Alignement dans cet espace de 44 tableaux de petits formats réalisés à partir de portraits originaux dessinés par des enfants de leurs camarades de classe. Dessins que j'accompagne par ma peinture. Ces 44 portraits font écho aux 44 enfants d'Izieu, victimes de la Shoah et à toute enfance assassinée.



2009 - 44 huiles sur dessins originaux d'enfants - papiers collés et huilés sur châssis - 31 x 24 cm copyright